Comme je vous l’écrivais dans l’article « Et moi, Éleveur, dans tout ça, vous avez pensé à moi ??? », le bien-être animal et le bien-être au travail des personnes qui s’en occupent sont liés. Tout comme le bien-être animal, le bien-être au travail est un état qui peut varier. D’où l’intérêt de savoir l’évaluer rapidement. Pourquoi ? Pour prendre du recul avant une prise de décision.
Estelle LEROUX, Chargée de mission innovation et co-construction en santé et bien-être animal de l’association LIT OUESTEREL, a fait un gros travail sur le sujet afin de fournir aux éleveurs un diagnostic. Vous trouverez plus de détails et de visuels dans l’article « Améliorer le BEA tout en assurant des conditions de travail sereines aux éleveurs ». Aujourd’hui ce questionnaire permet d’évaluer l’impact d’une mesure de bien-être animal sur la qualité de vie au travail de tous ceux qui sont au contact des animaux de l’exploitation. A terme, ce type d’outil pourrait servir aux personnes décisionnaires de l’élevage à se poser les bonnes questions avant de mettre en place telle ou telle pratique en faveur du confort de leurs animaux. Peut-être que certaines mesures paraissent difficiles ou contraignantes au premier abord mais qu’au final, elles sont positives sur différents aspects du travail ?
Estelle a aussi produit un jeu de cartes qui permet de classer ses propres critères de bien-être au travail d’un point de vue général. Qu’est-ce qui est réellement important pour moi dans mon métier d’éleveur ? Et vous verrez que même quand on n’est pas éleveur, la plupart des critères nous parlent…
Les critères sont répartis en 6 axes :
Que retrouve-t-on dans l’axe psychique ?
- Mon travail est-il cohérent avec mes valeurs personnelles ?
- Est-ce que j’éprouve de l’intérêt pour mon travail ?
- Suis-je satisfait par mon travail ?
- Suis-je serein au travail ?
- Est-ce que je bénéficie d’une reconnaissance de mon travail ?
Que retrouve-t-on dans l’axe cognitif ?
- Mon travail est-il facile ?
- Mes compétences sont-elles valorisées ?
- Est-ce que je peux déléguer tout ou partie de mon travail ?
Que retrouve-t-on dans l’axe social ?
- Ai-je trouvé un équilibre vie personnelle – vie professionnelle ?
- Comment se passe le travail lorsque plusieurs personnes œuvrent au sein de l’exploitation ?
- Mes actions sont-elles acceptables par les voisins, la sociétés, … ? Mes actions répondent-elles aux attentes sociétales ?
- Quelle est l’opinion de mes proches sur mon travail ?
- Quelle est l’opinion de mon entourage professionnel (autres éleveurs, autres professionnels de l’élevage comme les vétérinaires, les conseillers…) sur mon travail ?
Que retrouve-t-on dans l’axe environnement de travail ?
- Comment je me sens dans mon environnement de travail (bruits, odeurs, température, luminosité…) ?
- Suis-je souvent exposé à différents dangers (sanitaires, physiques, chimiques) ?
- Dans le cadre d’une mesure précise : Est-il facile de la mettre en place ? Nécessite-t-elle des changements importants ?
Que retrouve-t-on dans l’axe physique ?
- Est-ce que je fais beaucoup de déplacements ou de longs déplacements ?
- Suis-je souvent et/ou longtemps dans la même position (debout, à piétiner…) ?
- Lorsque je suis dans une position, celle-ci est-elle confortable ? La posture est-elle adaptée ?
- Ai-je beaucoup d’objets encombrants à porter ?
- Ai-je souvent des efforts physiques à réaliser (porter des objets lourds, pelleter…) ?
- Mes tâches sont-elles répétitives ?
- Ma cadence de travail est-elle acceptable ?
- Mon temps de travail est-il cohérent avec mes objectifs ?
- Mes équipements de travail sont-ils appropriés ?
Que retrouve-t-on dans l’axe économique ?
- Le revenu dégagé par mon activité est-il en accord avec mes objectifs de rémunération ?
Lorsque l’on utilise ces questions d’un point de vue général sur sa qualité de vie au travail, ça permet de se rendre compte de ce qui nous plaît dans notre métier. C’est particulièrement bénéfique pour celles et ceux qui ont tendance à voir le verre à moitié vide. L’autre intérêt est bien sûr de cibler les points qui nous embêtent et de réajuster ce qui peut l’être.
Lorsque le diagnostic est utilisé dans le cadre de l’évaluation d’une pratique de bien-être animal, on peut noter chaque critère entre -3 (ça le détériore) et +3 (ça l’améliorer) par rapport à une situation antérieure : par exemple, on peut évaluer les impacts sur le travail de la mise en place d’un protocole analgésique et anesthésique pour l’écornage des veaux par rapport à l’écornage sans mesure de gestion de la douleur. C’est ce qu’a fait Estelle auprès de 10 éleveurs sur environ 3 pratiques de bien-être animal par exploitation. Même s’il y a bien sûr des notes négatives, les notes moyennes par critère sont toutes positives. Si l’impact sur l’axe physique est très variable, les répercussions sur les autres axes sont très majoritairement bénéfiques. On ne peut pas tirer de conclusion sur un aussi faible nombre de personnes enquêtées mais ça rejoint les résultats d’autres études plus larges : améliorer le bien-être animal améliore le bien-être des éleveurs. Vous trouverez les liens à la fin de l’article. Comme le dit le proverbe « charité bien ordonnée commence par soi-même », pourquoi ne pas commencer par travailler sur le bien-être des personnes qui travaillent au contact des animaux ?
Alors si l’expérience vous tente, pourquoi ne pas s’inscrire à la formation « Concilier bien-être animal et bien-être de l’éleveur » ?
Si vous préférez les approches en présentiel, je peux vous accompagner en prestation individuelle. N’hésitez pas à me contacter en allant sur la page CONTACT.
A bientôt !
Article rédigé le 06/03/24 – mis à jour le 06/03/24
Articles et études sur le lien entre le bien-être animal et celui des personnes qui s’en occupent :
Chaire bien-être animal, L’amélioration du bien-être des animaux est toujours une contrainte pour les éleveurs, VRAI ou FAUX ?, 06/04/2023
Lactanet, Le bien-être des producteurs, c’est payant!, 20 septembre 2022
Gunnar Hansen B., Østerås O., 2019. Farmer welfare and animal welfare- Exploring the relationship between farmer’s occupational well-being and stress, farm expansion and animal welfare. Preventive Veterinary Medicine 170
Villettaz Robichaud, M., Rushen, J., de Passillé, A.M., Vasseur, E., Orsel, K. & Pellerin, D. (2019). Associations between on-farm animal welfare indicators and productivity and profitability on Canadian dairies: I. On freestall farms. Journal of Dairy Science, Vol. 102, No. 5, 4341-4351.